Une idée du lieu où se déroule l'action : le Roi Lion fut une source d'inspiration

Une idée du lieu où se déroule l'action : le Roi Lion fut une source d'inspiration

Chapitre 13 : Changement 2 Dimensions

Alors que l’histoire aura jusqu’ici été de l’ordre de l’ordinaire, elle ira dès lors crescendo et prendra une tournure sans cesse plus sensass. Pendant que ces animaux prendront un repos bien mérité, Gaïa sera à son tour en plein procès. Tandis que se jouera l’avenir d’Homme aux confins de la planète Terre, et on a vu de quelle manière, celui de Gaïa se jouera au fin fond des cieux, bien loin des yeux vicieux et des oreilles indiscrètes. Au moment même où elle se présentait devant les membres du Conseil de Sécurité, le cri du cœur de Lion parviendra jusqu’à leurs oreilles. Composé de tous les super-organismes régissant les planètes, des esprits supplantant les êtres, et présidé par Univers, il l’avait cité à comparaître. Gaïa, l’esprit de Terre, sera, elle aussi, jugée par ses pairs.

Jadis en effet, chacun s’était vu confier par Univers une mission impossible au premier quidam : damer le pion au néant en manageant une planète contre vents et tempêtes. Chacun selon ses talents et son agilité avait jadis modelé à sa guise son bloc d’argile, et à ce jeu-là, Gaïa s’était montré la plus habile. Car quelle stature avait sa sculpture, quel air avait sa statue circulaire !
Elle vivait sous une bonne étoile et surpassait les autres esprits dans l’imagination et la créativité. Sa réalisation, Terre, était une merveille sans pareille, à la jolie topographie, aux climats équilibrés, mais surtout à la fourmillante activité. Car toutes les planètes ne pouvaient se targuer d’abriter la vie et nombre d’esprits habitaient une morte planète en errance, où ils menaient une morne existence. Pour autant, il y avait d’autres belles réalisations parmi les vues des esprits et les vies extraterrestres n’étaient pas une vue de l’esprit. Certes, nulle n’abritait la biodiversité citée dans les chapitres précédents, mais certaines atteignaient tout de même un niveau de vie décent.
Mais vraiment, ce qu’avait fait Gaïa avait de quoi rendre baba et laisser bouche bée. Elle aura toujours recueilli l’admiration de tous pour la dextérité avec laquelle elle avait sculpté Terre et tous les membres du Conseil de Sécurité auraient souhaité y habiter. Nulle part ailleurs dans l’espace infini, une planète n’avait une telle classe, n’était à ce point finie, léchée, fignolée.

Ainsi la naissance de la vie n’avait-elle rien à voir avec la théorie de la panspermie, selon laquelle la vie est un élément fondamental d’Univers et a toujours existé, se développant en masse sur les planètes à partir de gamètes venus de l’espace. De fait se trouvera vérifiée l’idée de la génération spontanée, selon laquelle la vie a émergé sur Terre, verte, à partir de la matière inerte. A ceci près que l’élément fondateur avait avant tout été l’art et la manière de faire d’une planète morte et ennuyeuse un passionnant lieu habité, agité par une vie forte et regorgeant d’énergie.
Art et essais permettaient aux meilleurs cortex, avec expérience et talent, de forger des mondes d’autant plus envoûtant qu’ils étaient complexes. Et les esprits qui réussissaient à créer des espèces vivantes et intelligentes se voyaient de leur propre aveu élevés au rang de dieux, ce qui n’était pas peu. A l’inverse, les cancres de la création vivaient aux crochets de sinistres contrées et n’avaient à leur entretien que d’acres atmosphères et des terres stériles, avec une vie bien difficile.

Au sein du cosmos, l’osmose régnait par la force, car toutes les planètes n’étaient pas logées à la même enseigne, et elles étaient sous le règne d’un Univers au pouvoir sans précédent sur ses composants, vu ses antécédents et sa taille de géant. Même à l’échelon suprême, tout était régi par le système.
A la gauche d’Univers, Gaïa sera très respectée de tous les membres du Conseil et ne se sentira pas dans la peau d’une inculpée, car elle jouissait d’un statut particulier. Ce sera bien à regret qu’ils l’auront convoqué, car donner au premier de la classe le bonnet d’âne aura quelque chose de profane. Mais il sera aussi considéré en haut-lieu qu’il y avait lieu de faire quelque chose, qu’il était enfin temps car ces temps-ci, la vie n’y avait rien de rose. Terre était vraiment en bad et Gaïa en était malade. Et quand Terre-de-Fer souffrait sous les lames des armes, Gaïa–la-Gaillarde versait les larmes propres aux âmes. Si Terre était le plus bel astre, ça ne l’empêchait pas de courir le risque du désastre. Les plus beaux éléments sont aussi ceux qui s’abîment le plus facilement.
C’est pourquoi le Conseil de Sécurité prendra les choses en main : le droit inaliénable de ces « Star Spirits » à disposer d’eux-mêmes avaient tout de même des limites. En cas d’urgence, il se devait de réfléchir voire d’intervenir, prenant le risque de l’ingérence. Son rôle était de préserver les différentes créations, qui, dans un Univers en perpétuelle évolution, contribuaient à son expansion.

Voilà donc que Gaïa sera au cœur de toutes les humeurs, de toutes les rumeurs. Elle avait bel et bien fauté et Terre était de ce fait bien amochée, mais pas un conseiller n’aurait songé le lui reprocher. Car nul ne tenait à voir péricliter cette trouvaille d’ingéniosité, fruit de milliards d’années de travail d’arrache-pied : l’écrin des étoiles recelait en son sein des joyaux animaux, des espèces vivantes exceptionnelles, classées au patrimoine universel.

Univers, à l’instar de Lion sur Terre, dirigera les propos dans les airs, comme son statut lui imposait de le faire, écouté comme quelqu’un qu’on respecte par ce conseil de spectres.

- Comme l’a rappelé l’assemblée animale plus bas et auparavant, l’état de Terre est atterrant ! C’est pourquoi nous voilà ici réunis. Cette planète est en train de mourir, frappée en plein cœur de l’intérieur et non de l’extérieur.

Pour protéger sa planète des comètes, des astéroïdes et autres météorites, Gaïa l’avait entourée d’un barrière à la consistance particulière : l’atmosphère. Composée d’oxygène, d’azote, de dioxyde de carbone, d’ozone et autres gaz rares, ce mélange détonant désintégrait systématiquement tous les intrus épars, venus d’on ne sait où et qui tentaient de forcer le verrou. Réduits le plus souvent en d’innocentes poussières, ils retombaient sur Terre tels des feuilles mortes, avant que le vent ne les emporte. Certes, ce bouclier n’avait pas empêché quelques météorites de grande taille de passer, celles qui avaient trouvé la faille. Mais Terre avait jusqu’ici été plutôt épargnée, protégée qu’elle était par Jupiter qui, grâce à sa grande force d’attraction, rejetait cette matière en suspension, indésirable car non digérable, hors du système solaire. Par manque de prévoyance, nombre de ses consœurs n’avaient pas eu cette chance : constamment criblés de ces balles au tireur inconnu, elles pouvaient à tout moment, c’était attendu, succomber, perdre la face et être effacées de la carte faute d’une protection efficace.
Finalement, la mort d’un astre de cette manière était quelque chose de bien banal, c’était loin d’être un mal pour Univers. Il fallait bien qu’il se rénovât, c’est aussi pourquoi existaient les supernovas, ces mamies-étoile en phase terminale, implosant en dégageant une énergie considérable ainsi qu’une grande partie de la matière stellaire qu’elles avaient élaborées pendant leur vie. Vie et mort étaient intimement liées comme le Yin et le Yang, car Univers aussi était né de l’explosion originelle, qu’on appelle Big Bang.

Là, on ne pourra s’empêcher de penser qu’ils étaient dans le vrai : elle n’aura rien de naturelle et tout d’artificielle, cette autodestruction, le verdict était sans appel. Echappant aux lois de l’espace, à toutes les tenaces tentatives d’explication, cette déliquescence sera une menace de la pire espèce. C’est pourquoi la mort annoncée de Terre provoquera un tel brans le bas de combat ici-haut et là-bas-bas. Le principal sera donc de sauver ces espèces animales réunies en tribunal, condamnant indirectement les végétaux, dommages collatéraux tout trouvés, ce à quoi aucun membre du Conseil de Sécurité n’aurait pensé opposer son veto. A l’exception de Palétuvier, arbre aux pieds mobiles et capable de déplacement, ainsi que des plantes vivant sur le lieu du rassemblement, aucun autre végétal n’aurait pu être présent. Réunir une telle collection botanique eût été trop compliqué, sauver cet autre trésor qu’est la flore utopique. Mais de toute manière, Gaïa, en bonne jardinière, avait toutes les graines nécessaires pour reverdir une autre terre.

Toute cette faune nombreuse et réunie en un seul lieu constituait un échantillon complet de ce qui restait et de ce qui devait être préservé. Cependant, le temps qui défilait sur Terre jouait contre tous en augmentant le risque de voir les émissaires, à bout de nerf, se disputer et s’entredévorer. Devant le risque de destruction de ce patrimoine, le Conseil de Sécurité s’apprêtera à prendre les dispositions idoines.
Aux grands maux les grands remèdes, il faudra qu’à son tour Univers plaide :

- Le bateau Terre est en flamme, et le seul moyen de faire des rescapés, c’est d’envoyer un radeau de détresse pour recueillir ces naufragés. La piteuse Terre ne sera bientôt plus, et, si cela nous brise tous le cœur de voir brûler l’immeuble, ça ne doit pas nous empêcher d’agir et de sauver les meubles. Il est temps aussi d’offrir à Gaïa et tous ses futurs sans-abris un lieu de vie neuf, un autre pied-à-terre, un nouveau terreau, une Terre autre. Cette intervention in extremis n’est de sa nouvelle vie que le prémisse. Ainsi, une deuxième fois sur l’ouvrage elle devra remettre son métier, car elle a manifestement fauté. Cette humaine créature était une erreur de la nature. C’est dans un autre endroit que Gaïa renaîtra de ses cendres, il n’est à présent plus temps d’attendre. Telle est la décision du Conseil, elle est sans pareille : bientôt il faudra qu’elle appareille, qu’elle conduise l’exode pour arriver en Terre Promise, pour enfin reconstruire selon son mode et à sa guise. Mais il faut qu’elle ait conscience que cette deuxième chance est une faveur, une preuve de confiance, et qu’il n’y en aura pas d’autre en cas de malheur.

Puis s’adressant directement à la concernée, lui indiquant l’étendue qui s’offrira à leur vue :

- Tu connais d’instinct le chemin que tu emprunteras demain. Mais avant de quitter le Conseil de Sécurité puis de quitter Terre, embrasse une dernière fois du regard ton futur ex-système solaire : jette donc un dernier coup d’œil sur Soleil, qui t’a bien aidé à faire ta merveille, sur Mercure, dont tu n’as jamais eu cure, sur Vénus, ta petite puce, sur Mars, à qui tu aimais tant faire des farces, sur le groupe d’astéroïdes, planète ratée comme ton androïde, sur Jupiter, protectrice de ta matrice Terre, sur Saturne, à qui tu as souvent cassé les burnes, sur Uranus, à propos de laquelle je ne ferais pas de commentaires, sur Neptune, la copine de Lune, sur Pluton, avec qui tu n’as jamais eu un semblant de conversation et enfin sur Sedna et son acné, faite de multiples Etnas… Ton erreur a été d’ignorer tes voisines, de ne pas avoir tenu compte de leurs conseils qui n’étaient pour toi que comptines, de ne pas avoir écouté les avertissements de ton environnement quand il en était encore temps. Elles aussi ont par le passé abrité la vie, mais tu n’as pas cru en leur expérience à cause de quoi Terre connaîtra bientôt la déchéance. Elle restait la seule planète vivante du secteur, il n’y en aura plus dans quelques heures… On n’apprend pas que du local ; du global aussi tu dois t’inspirer. Car tu es à la fois à la tête d’une planète et un maillon d’Univers, auquel tu ne peux tenir tête. Si tu ne veux pas gâcher ton dernier jeton, privilégie l’intégration. Ne te disperses pas, fais attention : tu as pour toi un capital vie sans comparaison mais une assurance tout risques à consommer avec modération, alors ne te lance pas dans de dangereuses créations. Voilà ce qu’Univers pouvait te faire comme recommandations, tout le reste est maintenant de ton rayon.

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